RAY BRADBURY ET LA FRANCE, UN HOMMAGE
Bien avant
1978 si l'on en croit l'Express
du 9 au 15 novembre 1984, Ray Bradbury était venu à Paris. Un
article surprenant intitulé 5400 secondes de bonheur pour
Ray Bradbury nous apprend
qu'il avait visité de nuit la capitale entre deux trains alors qu'il
devait se rendre de Calais à Rome. On peut supposer qu'il venait
d'Angleterre. Et ce qu'il avait découvert lui avait donné envie d'y revenir. Ce qu'il a fait de nombreuses fois.
1978
Ray Bradbury est l'invité de la France, cette
année-là. Je lui ai écrit à deux reprises et dans l'une de mes lettres je lui ai dit que j'avais appris par la télévision son arrivée et qu'il venait en France à propos de Jules Verne. En date du 25 mai, il m'a répondu qu'il serait à Cerisy du 15 au 25 juillet. C'est le Ministère des Affaires étrangères qui l'a
invité pour un séjour de trois semaines. Il a fait part de son
désir de visiter les châteaux de la Loire et le Palais des papes à
Avignon. Une voiture et une interprète sont mises à sa disposition
par le Ministère.
Au cours de
son intervention à Cerisy la Salle, il a évoqué sa traversée à
bord du Queen Elisabeth II, deux semaines auparavant, ce qui donne à
penser qu'il arriva le 7 ou le 8 juillet si l'on tient compte du
fait que le voyage durait cinq jours. Il ne montera à bord d'un
avion qu'en 1982. Voici ce qu'il a dit à ce sujet :
« En faisant la traversée, il y a deux semaines je songeai à
un fait parfaitement évident, mais sur lequel personne, je crois,
n'a encore écrit de poème. Je considérai le fait que dans les cinq
millions d'années de notre histoire de l'humanité se dégageant de
l'animalité, à aucun moment de notre histoire, aucun animal sauf
nous-mêmes, n'avait vu les étoiles. Voilà notre unique travail,
regarder les étoiles. Je n'accepte pas le destin tragique de
l'humanité sur la terre : je refuse même de l'envisager. Et
quiconque ici désire se perdre peut sortir dans la cour et se tuer
cet après-midi : je n'ai pas de temps à perdre avec des gens
de ce genre. Mon propre pays est plein de cet esprit de destruction,
j'en ai par-dessus la tête. Je combattrai contre un si persistant
esprit d'auto-destruction, parce que nous avons survécu. Le titre de
ma conférence est censé être aujourd’hui, « la révolution
invisible ». Ces choses, comme la Lettre volée d'Edgar Poë,
sont là sous nos yeux mais nous ne les voyons pas. Nous ne prenons
pas garde que nous sommes en vie, parce que nous sommes en vie.... »
(1)
14 juillet, vendredi
– Ray Bradbury assiste dans la tribune officielle du Gouvernement
au défilé traditionnel de cette année-là (Libération du 28
juillet 1978). Il déclare au journaliste Marc Voline :
« C'était très bien... intéressant. Je n'avais jamais vu de
défilé militaire. Je vais à une chose comme ça... juste pour voir
à quoi ça ressemble. C'est tout. La meilleure façon d'y penser...
Je vais tout le temps à des expositions canines, et puis je rentre
chez moi et j'élève des chats. C'est aussi simple. » Il
répondra à la question pourquoi avoir accepté de présider le
Colloque sur Cerisy sur Jules Verne : « Tout d'abord c'est
un honneur pour moi : Jules Verne a joué un rôle tellement
énorme dans ma vie à partir de 9-10 ans... Je pense que lorsque
l'histoire du monde sera écrite, d'ici quelques siècles, beaucoup
d'auteurs que nous considérons comme célèbres et marquants auront
été oubliés, tandis que les noms de H. G. Wells, Jules Verne et
quelques autres écrivains de science-fiction demeurerons... Parce
qu'ils ont changé l'histoire du monde ; ils nous ont aidé à
survivre, mieux que beaucoup d'autres artistes.... »
16 juillet, dimanche – L'interview
de René Barjavel dans le JDD est datée du 16 juillet. Il
y a tout lieu de penser que l'émission de Bernard Pivot, Apostrophes
a été enregistrée bien avant son arrivée à Cerisy-La-Salle.
17 juillet, lundi – Arrivée de Ray Bradbury le matin à Cerisy-la-Salle
pour participer au Colloque Jules Verne, en voiture avec
son épouse Maggie, son chien et l’interprète mise à sa
disposition par le ministère des Affaires étrangères, Mme de
Bonneval, femme de l'aide de camp du Général de Gaulle.
(Ray Bradbury préparant sa communication, Bill Butcher et Mme de Bonneval) |
18 juillet, mardi (le matin) - A la suite de la
communication de Françoise Gaillard : L'Eternel Adam ou
l'Evolutionnisme à l'heure de la Thermodynamique et sur une
intervention de Dominique Lacaze, Ray Bradbury participe à la
discussion.
19 juillet, Mercredi (le matin) -
Communication de Ray Bradbury : La Révolution invisible.
Il participe ensuite à la discussion qui a lieu sur sa propre
communication.
Ray Bradbury et Maggie |
19 juillet mercredi Départ de Ray Bradbury et de
son épouse Maggie.
22 juillet samedi matin départ de ma nièce et
de moi-même à la gare SNCF à proximité de Cerisy la Salle pour
Paris. On est accompagné en voiture. Au kiosque de la Gare, j'achète
Le Journal du Dimanche daté du 23 juillet et qui contient un article
de René Barjavel avec une interview de Ray Bradbury. L'article
m'apprend qu'il compte se rendre en visite dans les Châteaux de la
Loire, il tient à visiter Chambord dont les grandes cheminées
l'intriguent, puis à Avignon. De retour à Avignon, je joins
Elisabeth Gille qui dirige la collection Présence du Futur et
qui me donne le nom de l'Hôtel où il est attendu près du Palais
des Papes afin que je puisse le rencontrer. C'est l'Hôtel de la Cité
des Papes aujourd’hui disparu et remplacé par le Mercure. Après
nous être retrouvés, nous avons discuté une bonne heure attablé
sur la terrasse d'un café non loin de l'Hôtel de ville et je lui ai
offert Les Chroniques Martiennes sous jaquette illustrée par
Bilal dans la collection 1000 Soleils (Gallimard, 1978). Il en a été très ému et nous avons
parlé de nouveau de la mort de Leigh Brackett, la scénariste de
Howard Hawks sur ses plus célèbres westerns et qui l'avait
beaucoup aidé à débuter dans la carrière d'écrivain. Il me
confirma qu'il l'avait assistée jusque dans ses derniers moments à
l'Hôpital. Il ajouta aussi qu'il était intervenu auprès de Georges
Lucas pour que son nom soit mentionné au scénario du second STAR
WARS, L'Empire contre-attaque.
28 juillet soirée – diffusion de l'émission
Apostrophes de Bernard Pivot intitulée Le Tour de Jules Verne
en 70 minutes (1h 18m). Ray Bradbury y rendra hommage à la
France à plusieurs reprises.
1984
18 septembre - BRADBURY IN PARIS organisé par
Présence du Futur, Denoël. 30e anniversaire des Chroniques
Martiennes. Réception au BALAJO le mardi 18 septembre 1984 à 19
h.
Carton d'invitation au cocktail oraganisé par les Editions Denoël |
1986
Avril – Sorti du livre La Solitude est un
cercueil de verre, un polar
façon Bradbury, c'est à dire plein de poésie. Un portrait
de l'auteur est prévu dans le Nouvel Observateur du 23 avril. En
principe Ray Bradbury sera présent à Paris jusqu'au 13 juin. Un
sujet prévu sur l'auteur serait tourné au Festival de SF de Metz
(et diffusé dans l'émission des Frères Bogdanoff « Temps
X » sur TF1. Cependant le voyage de Bradbury à Metz ne se fera
pas bien que Philippe Hupp qui organisait le festival soit allé le
solliciter par deux fois à Los Angelès. Il prétextera un problème
à la suite d'un incident en Lybie et sur lequel Hupp n'était pas
partie prenante. On peut penser que son voyage d'avril à juin
l'avait fatigué et qu'il n'avait peut-être pas envie de revenir
pour le festival.
1990
10 janvier – le
Journal Le Figaro nous apprend que Ray Bradbury sera l'invité de
l'émission Ex-Libris à 22h35 sur TF1. L'article du Figaro est
intitulé : Bradbury au-delà de la Sf.
Le romancier américain ne borne pas ses passions uniquement à la
SF.
18 janvier – Ray Bradbury dédicace A
l'Ouest d'Octobre à la Librairie Virgin Megastore sur les Champs
Elysées. C'est un communiqué de Denoël daté du 15 janvier qui
nous l'apprend.
1995
16 octobre – Dans le Figaro, le journaliste
Olivier Delcroix nous apprend dans un article intitulé Ray
Bradbury : « Moby Dick, c'est une chasse à Dieu ! »
et il débute en nous annonçant qu'à 75 ans, Ray Bradbury conserve
toujours un grand amour pour la France. Il possède à Paris un bel
appartement qui donne sur la Tour Eiffel et profite de ses passages
réguliers dans la capitale pour faire de longues marches jusqu'à
Notre-Dame.
1997
2 octobre 1997 - RAY BRADBURY est de passage à
PARIS article paru dans le Figaro Littéraire. Dernière visite de
RAY BRADBURYen France si je ne me trompe avant son AVC en 1999.
Depuis le poète de la planète mars a cessé
de caresser sa lyre et nous a quitté en attendant qu'un jour ses
cendres soient dispersées sur la planète rouge.
Charles Moreau
Copyright juillet 2012
Mes sincères remerciements vont aux Editions Denoêl
pour l'aide sans condition qu'elles m'ont apporté.
(1) La traduction de la conférence de Ray Bradbury a
été accomplie par Simone Vierne et Renée Colombe, d'après la
transcription de Bill Butcher. On retrouvera cet extrait de son
intervention dans le volume 10/18 consacré au Colloque de Cerisy sur
Jules Verne et les sciences humaines. Mes remerciements vont aussi aux organisateurs du Colloque et aux "Verniens" qui m'ont accueilli avec sympathie.
Le tour de Jules Verne en 70 minutes archives de l'Ina
Apostrophes - 28/07/1978 - 01h18min33s
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A l'occasion du 150eme anniversaire de la
naissance de Jules Verne, assemblée d'invités spécialistes de
l'auteur. - Ray BRADBURY, traduction simultanée, s'élève contre
les critiques énoncées. - Simone VIERNE, professeur à Grenoble,
auteur d'un livre sur Jules Verne et auteur des introductions des
éditions Garnier Flammarion. Pour elle, Verne est le romancier de
l'aventure scientifique. - Marc SORIANO souligne son antiféminisme.
- Charles Noel MARTIN, physicien, évoque ses rapports avec Hetzel.
Débat autour des idées politiques de Jules Verne, ses
contradictions, humanisme et réaction, antisémitisme, reflètent
bien son époque. - Francis LACASSIN publie des écrits de Jules
Verne inattendus. - Francois RIVIERE journaliste, publie un album
"Jules Verne, les images d'un mythe" et dirige la
collection "La bibliothèque aérienne". - Marc SORIANO,
professeur à PARIS 7, et à l'EHEESS, publie deux livres, une
biographie de Jules Verne et un "Portrait de l'artiste jeune".
Les invités racontent leur découverte de l'auteur et son influence.
Débat sur un point controversé de la biographie, la fiancée et le
départ en mer. L'influence d'Hetzel, les calembours. Photos
extraites de l'album de François Rivière.
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