Il est toujours triste d’avoir à exécuter un ouvrage qu’on aurait aimé porter aux nues. Le dernier téléfilm basé sur l’adaptation d’un roman célèbre du tandem Maquet-Dumas semble avoir été accompli par une tâcheronne ignare qui n’a jamais lu l’immortelle histoire de la Dame de Monsoreau (1846) et de sa vengeance contre le duc d’Anjou dans la suite intitulée Les Quarante- Cinq (1847-1948). C’est un peu comme si ayant à faire le scénario d’un « Laurel et Hardy » on aurait fait un film sans les deux grands acteurs… Ou un « Charlot » sans Charlie Chaplin. Ainsi la scénariste sans imagination qui a pratiqué les sombres coupures dans son adaptation s’est dit qu’il valait mieux supprimer le fou Chicot et le moine Gorenflot et de reporter les actes du premier sur le preux chevalier de cette histoire le Comte de Bussy d’Amboise. Si bien que celui-ci passe son temps à courir à droite et à gauche et n’a même plus le temps d’embrasser sa dame. Chicot assassiné au propre et au figuré, c’est le confident d’Henri III retiré de l’action au moment le plus inopportun quand il découvre le complot des Guise. C’ est aussi raconter une autre histoire que celle qu’ont écrit Auguste Maquet et son compère Alexandre Dumas qui comme on sait savait si bien réécrire ce qui était déjà écrit par ses nègres. Chicot incarne la conscience du roi et le remet à chaque fois sur le bon chemin dans la lutte capitale contre les Guise, il est la pièce essentielle sur un terrible jeu d’échec qui relate la fin des Valois et c’est une honte profonde de l’avoir supprimé. Qui donc dans ce foutoir qu’est devenu FRANCE 2 a laissé une telle tâcheronne l’exécuter d’un coup de poignard, alors qu’il survit à la Dame de Monsoreau et aux Quarante-Cinq puisque tous ceux qui ont un peu d’imagination l’on fait revivre dans des suites sans fin, sans jamais le tuer, même quand ils annonçaient La Fin de Chicot (Paul Mahalin)…
Venons-en au crime ou à l’assassinat comme vous le voudrez :
On peut comprendre qu’une adaptation modifie un temps soit peu une histoire extrêmement prolixe, foisonnante, mais un scénariste qui a lu l’œuvr e évite de la défigurer : Ca commence mal et dès les premières images, on débute par une scène de western où l’animal poursuivit est un pauvre sanglier. Le vilain, le grand veneur, le comte de Monsoreau, cravate celle qu’il veut être sa belle et la jette à bas de sa monture pour l’empêcher de tuer une bête qui lui est réservée sur son domaine. Ce premier assassinat gratuit n’économise rien de l’adaptation de l’immortel chef-d’œuvre où l’on voit l’immonde boucher achever la gentille petite biche qu’a apprivoisée Diane de Méridor. Honte à la scénariste qui n’a pas été sensible à cette superbe histoire d’amour et à la superbe scène ! Cette belle héroïne se contente de se promener dans le parc avec son amie madame de Saint-Luc à qui elle confie ses malheurs… Nous ne voyons pas en quoi couper cette scè ne et la remplacer par une course poursuite complètement fausse est une adaptation…. Fi donc du mariage de Saint-Luc, l’un des mignons du roi, mariage qui présente la cour du dernier Valois, Henri III. C’est cela qu’il fallait reconstituer… et avec d’excellents acteurs. Les tableaux ne manquent pas sur cette cour… et l’on n’avait pas besoin d’aller chercher midi à quatorze heures. Ce western continue si bien qu’on n’a pas le temps de savoir même à qui l’on à faire. D’abord pourquoi avoir renommé la terrible duchesse de Montpensier en Duchesse de Guise qui était la femme de son frère ? Honte à la scénariste ! Pourquoi avoir renommé le chirurgien Rémy, un bon français qui soigne et recoud les blessures de Bussy et l’avoir affublé d’un nom (Mattéo) et d’une histoire à l’Espagnole ? Un scénariste prétentieux ne s’aviserait pas de faire une chose pareille mais seule une scénariste idiote irait inventer une telle histoire…
L’acteur qui incarne Chicot, acteur médiocre au demeurant et qui nous fait regretter l’excellent Michel Creton, disparaît lors d’une réunion des ligueurs : il y est démasqué stupidement et assassiné proprement, c'est-à-dire salement alors que dans le roman, il suit toute la réunion et la rapporte fidèlement à Henri III, tout en se moquant finement de celui-ci. Chicot est la chair vive du roman, ce qui le fait vivre avec éclat et avec humour. Ne parlons pas du pauvre Gorenflot qui est son faire-valoir dans des dialogues d’une inénarrable saveur dans le roman. Gorenflot maladroit trahit la Ligue à chaque fois et c’est lui que consulte autour d’une table superbement dressée le très habile Chicot qui connaît la gourmandise du moine afin de savoir où en sont les complots de la Montpensier et de ses brutes de frères qui ont autant de sang sur les mains que le grand veneur du roi.
Tout est faux dans ce téléfilm même la fin. Bussy périt dans un combat héroïque en s’empalant sur une grille du château où on lui a tendu un piège. Et ce ne sont pas les quelques scènes empruntées aux Quarante-Cinq pour boucler vite fait le cycle comme si la scénariste disait qu’elle n’a pas envie d’adapter la suite épouvantée par l’affreux pastis qu’elle nous a servi. A la limite, si c’est ce genre d’adaptation qu’on doit continuer à nous présenter sur FRANCE 2 , alors il vaut mieux voir les abominations de la première et de la sixième chaine. Pour en finir avec ce travail bâclé, disons tout le bien que nous pensons toujours, si longtemps après, de la très belle réalisation de Yannick Andréi avec l’adorable et la sublime Karin Petersen en 1971. Plutôt revoir ces épisodes que cette calamité miteuse.
Charles Moreau.
1 commentaire:
Bonjour. Merci pour votre analyse. Je n'ai pas vu ce téléfilm car ça me semblait impossible de faire une adaptation valable sur un format si court. Par contre, les russes ont fait une nouvelle série à gros moyen en 1998, voici le lien youtube du premier épisode, il faut activer les sous titres qui sont en anglais !
https://www.youtube.com/watch?v=fzjM1FKSgQI
Par ailleurs, si quelqu'un peut m'aider, je cherche les 4 livres de Paul Mahalin, ceux qui suivent "les 45"...
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