mercredi 7 novembre 2012

ROBERT GAILLARD et ROBERT BRESSY


Dès 1943, les romans de Robert Gaillard furent publiés dans des journaux, tels qu’Actu, L’Espoir, La France au Combat, La France Hebdomadaire, Le Hérisson ou Ici Paris. Même la revue féminine Rêves parvint à publier les Aventures de Jacques Mervel (n° 159 du 14-7-1949). Ajoutons que l’hebdomadaire RADAR (dont la devise qui devint célèbre était : «Radar était là ») adapta en bandes dessinées L’Homme de la Jamaïque de fin 1950 à mars 1951 et que le grand Rino Ferrari y donna de superbes planches. Radar publia aussi en 1954 de mai à juillet son roman La Reine des Galapagos avec un dessin pour chaque page de texte.


A partir du moment où il fut bien ancré au Fleuve Noir, et sa renommée était déjà très grande, Robert Gaillard vit ses nombreux romans adaptés les uns derrière les autres en bandes dessinées verticales essentiellement dans le PARISIEN LIBERE. Il y en eu une bonne quarantaine et il fut certainement le seul auteur de son époque à bénéficier d’une telle reconnaissance. Ces bandes verticales illustrée par Jo Barque (José Laffond de son vrai nom) débutèrent en janvier 1965 avec, bien entendu la tétralogie consacrée à Marie du Parquet et à son héritier (Marie des Iles, Marie Galante, le Capitaine Le Fort et l’Héritier des Iles) au début de 1965 et se poursuivirent jusqu’à la fin de 1966. A partir de cette date, Jo Barque démarra Les Aventures de Jacques Mervel qu’il poursuivit presque jusqu’à la veille de sa mort en 1971. Un peu auparavant Walter Farher avait pris le relais avec les Aventures exotiques.



(Dessins Jo Barque)

Quatre dessinateurs travaillèrent donc successivement ou par intermittence sur ces romans dont le nombre fut considérable, une quarantaine. Ce sont : Jo Barque (pseudonyme de José Laffond), Walter Farher, Daniel Massard et Robert Bressy. Tous quatre mirent leurs solides talents respectifs au service des œuvres du grand romancier. Celui qui en publia le plus grand nombre fut certainement Robert Bressy qui en adapta 17 dont la liste est donnée ci-dessous. Un cinquième, Jacques Carlotti, assura une transition en 1976 dans les adaptations de Robert Bressy avec Perverse Nemorosa pour lui permettre peut-être de respirer. Ce sont :
LES CONJURES DE MANAGUA 84 B (Sayol) 8-11-74
SORTILEGES INDIENS 144 B (Yves Laurent) 21-12-74
GUAYAQUIL DE MES AMOURS 102B Juillet 1975
MEURTRES EXOTIQUES 120 B février 1976
L’ARCHIPEL DES VOLUPTES 204 B mars à nov. 1977
LE SANG DU TIGRE 84 B dec. 1977-1978
LA SULTANE DE JOLO 114 B Avril 1978
CYCLONE SUR LA JAMAIQUE 120B Aout 1978
NI L’OR NI LA GRANDEUR 144 B Jan. 1979
LE MIEL DE LA HAINE 150 B 27 Déc. 1979
AU PIED DU SOLEIL 138B Juin 1979
LES FRUITS DE LA VIOLENCE 150 B Jan-Juin 1980
LE SANG BRULANT 174 B Aout 1980
L’OUEST SAUVAGE 174 B Mai 1981
LE VAGABOND DE LA JUNGLE 162 B Déc 1981-Mai 82
LA VOLUPTE ET LA HAINE 168 B Juin à Oct 1982
LA LUXURE DU MATIN 186 B Jan à Sep. 1983
(Dessins d'Yves Laurent)
La tétralogie consacrée au Napoléon noir, Toussaint Louverture, l’homme qui avait gardé Haïti à la France avait débuté avec La Volupté et la haine et La Luxure du Matin et devait se poursuivre avec Désir et liberté et La Chair et la cendre mais ces deux derniers romans ne furent pas adaptés à cause des changements qui se produisirent dans la presse de l’époque.
Un mot sur les scénarii : en principe, ils émanaient tous de la firme Opera Mundi, grande pourvoyeuse de textes destinés aux illustrateurs. On peut imaginer qu’elle possédait un atelier d’écrivains travaillant jour et nuit pour elle. Certains étaient signés par de noms très connus : Rémy, Juliette Benzoni ou Anne et Serge Golon ; les adaptations des romans de Robert Gaillard furent signés d’après Robert Gaillard et pour l’instant celui ou ceux qui firent le découpage de ces romans demeurèrent inconnus. Le fils du Colonel Rémy que j’ai pu interroger ne sait pas si c’est son père qui signa les innombrables scénarii d’OSS 117 ou de Coplan. Il n’a retrouvé aucun contrat avec le Parisien Libéré dans les archives de son père et l’on peut penser que la firme travaillait alors sans contrat. Lorsqu’Opera Mundi fut liquidée, on demanda à certains illustrateurs s’ils voulaient récupérer les scénarii mais pour la plupart ils les refusèrent. Ils ne savaient qu’en faire. Et il y a de grandes chances qu’ils partirent tous à la poubelle.
ROBERT BRESSY
Robert Marius Bressy est né à Avignon le 5 septembre 1924 route de Lyon, quartier de la Croix verte, villa St Louis. Son père Lucien Lacroix Bressy originaire de Violès (84) était propriétaire dans la région. Sa mère, Yvonne Sayol (ce qui explique son pseudonyme lorsqu’il signe l’adaptation du roman Les Conjurés de Managua) était originaire de Ceret dans les Pyrénées Orientales. Après une scolarité normale, aimant le dessin, il s’inscrit aux Beaux-Arts de Marseille. En 1939, lorsque la guerre éclate, il assiste à la défaite et en 1944 à l’âge de 19 ans, il rejoint la résistance pour ne pas partir en Allemagne. A son retour dans sa ville natale, il est démobilisé fin janvier 1946, un ami lui conseille de monter à Paris où il pourra exploiter ses talents de dessinateur. Il entre alors dans l’atelier du célèbre animateur Paul Grimaud mais n’y reste pas longtemps car cette activité d’animation est condamnée par des erreurs de gestion. Il aura la chance d’y connaître Jacques Prévert et quelques autres. Il débute dans le journal Ce soir où il donne d’abord une adaptation du Capitaine Fracasse (Théophile Gautier) et puis des Pardaillan (Michel Zévaco). Puis il entre en 1952 à l’agence Opera Mundi à qui il va donner le plus gros de sa production. Il crée à la demande de Paul Winkler pour le Parisien Libéré, à partir du 1er octobre 1954, et sur des scénarii de Pierre Cobore, le personnage d’une jeune fille assez idéalisée, Mique. Son histoire et surtout celle de sa famille bien française va durer jusqu’à la fin de 1956 (soit 706 bandes quotidiennes).


Après Mique et toujours pour Opéra Mundi, il donne Le Docteur Claudette (scénario de Juliette Benzoni) qui parait le 7 mars 1955 dans l’Aurore. Son œuvre la plus remarquable est incontestablement son Fu Manchu (Sax Rohmer) pour le Parisien libéré sur des scénarii de Juliette Benzoni qui va jusqu’à traduire les volumes que la Collection Le Masque n’avait pas publié. Fu Manchu durera du 16 février 1962 au 25 octobre 1973, soit 3630 bandes quotidiennes.
Ajoutons que Robert Bressy adapte aussi de nombreux romans populaires d’Emile Richebourg, d’Honoré de Balzac, d’André Armandy, ainsi que des romans de Jack London, de Michel St Loup, de Pierre Benoit ou de Phillipe Hériat. Pour le journal l’Humanité, et c’est aussi un de ses tours de force, il va illustrer à partir du 5 décembre 1974, les principaux romans d’anticipation de ROSNY Ainé et là aussi on peut parler d’une œuvre remarquable. Ce sont, sur des découpages de Raymonde Borel-Rosny :
Les Navigateurs de l’Infini (78 bandes).
Les Astronautes (60 bandes) jusqu’au 16 mai 1975).
Les Xipéhuz (39 bandes) du 17 mai au 4 juillet 1975.
Le Trésor dans la Neige (66 bandes) du 4 août au 19 nov. 1975.
Nymphée (65 bandes) du 20 nov. 1975 au 4 février 1976.
La Mort de la Terre (74 bandes) du 5 février au 3 mai 1976.

(Les Xipéhuz, 1975)
Après la disparition des bandes dessinées dans les journaux de presse, ce que nous regrettons beaucoup, Robert Bressy ne s’arrêtera pas pour autant de dessiner. Il illustre des romans pour la jeunesse chez Hachette. Abandonnant la fiction, il se lance dans des adaptations très didactiques pour les éditions Chancerel ou les Editions du Signe, entre autres, et qui font le point sur des faits sportifs (Coupe du monde ou Jeux Olympiques) ou de société (Histoire du Canada, de la Suisse, de la Tour Eiffel ou de l’Alsace. A l’âge de 86 ans, il dessine toujours autant avec la plus grande maîtrise. L’ensemble de ses bandes dessinées horizontales et verticales (16500), dont les romans de Robert Gaillard ne sont qu’une petite partie, constitue un travail de dizaines et de dizaines d’années que bien peu de dessinateurs actuels ne pourront atteindre.
Sources : PRESSIBUS : Cahier n°1 (1990-1992) article d’Henri Filippini (L’Elégance tourmentée de Robert Bressy). Recherches de Charles Moreau et de Jean-Luc Buard (pour Marie des Iles et sa suite dans le Parisien Libéré).

(C) Charles Moreau mars 2010.

Note : Jean Pierre Moumon a réédité Les Xipéhuz et La Mort de la Terre que vous pouvez acheter pour 16 euros chacun (port compris et paiement par chèque) à l’adresse suivante : 19 rue Thiers, 83590 GONFARON.

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